shiko1

crédit photos: Soumaila Ouedraogo

Shiko

En cette période de quarantaine et de carême (même étymologie), qui résonne aussi avec soin (care) et charité, dans la continuité du précédent et inspirant texte d’Olivier, je souhaiterais présenter Shiko (四股), l’exercice du sumo que nous exécutons lors de chaque début de pratique au dojo. Quel est le sens et l’intérêt de cet exercice ?

Shiko – 四 « quatre » 股 « membre » – peut vouloir dire « à quatre pattes » qui refléterait la dimension animalière, peut-être simiesque ou de bête de somme, de la forme. « Quatre » peut signifier aussi toutes les directions d’un plan à deux dimensions, soit la terre. Shiko peut alors représenter les membres inférieurs, ou l’ancrage dans la terre. En tout cas, Shiko permet d’assouplir et de renforcer les membres inférieurs, les cuisses, le fessier et les muscles profonds du tronc.

Dans notre pratique, la force qui nous intéresse particulièrement est la force des muscles extenseurs, la force provenant de la terre, la force des appuis, les muscles profonds qui permettent de tenir notre axe, la force qui nous propulse comme une vague déferlante lorsque l’on marche ou que l’on frappe. Shiko permet de développer cette « conscience arrière » que nous rattachons de manière poétique ou ésotérique à la conscience des ancêtres. Shiko est donc une forme essentielle de notre gymnastique préparatoire. Elle a une longue tradition populaire au Japon. Les bienfaits y sont encore assez connus et enseignés.

Pour rappel, la forme s’exécute à partir des pieds écartés un peu plus que la largeur des épaules (2 fois fermeture/ouverture de l’aine). Les pieds doivent s’ouvrir d’au moins 90 degrés. Nous recherchons idéalement une ouverture de 180 degrés, surtout pour la partie des étirements. L’important est que les genoux soient parfaitement alignés avec les pieds, le dos bien droit, les épaules relâchées. En basculant en avant et en se relevant le dos doit toujours rester droit. Penché, le poing au sol, l’aine est bien étirée. Droit, il est nécessaire d’avancer le bassin le plus possible comme si « un ancêtre » nous poussait le bassin. Notez la beauté de la forme, particulièrement avec le hakama, et l’impression de puissance qui s’en dégage.

shiko2shiko3

Puis, en poussant sur chaque genou, nous étirons un peu plus l’aine. Le buste en pivotant de chaque coté permet aussi d’étirer les omoplates.

shiko4shiko5

Enfin, l’exercice Shiko à proprement parler, peut commencer ! Successivement, d’un côté et de l’autre, nous déplaçons notre axe sur l’alignement Yusen / Genou. Après, en basculant le buste vers l’extérieur, en regardant le sol, en se tenant la cuisse, le corps relâché, nous levons la jambe jusqu’à la limite de l’équilibre pour tenir la position 2 ou 3 secondes. Ce n’est pas la jambe qui se lève, mais le corps qui bascule ! « YOUSHA !! » En retombant, souplement, en amorti et sans bruit sur la position initiale, on peut claquer la cuisse ou la fesse pour garder la conscience et relâcher le corps.

shiko6

Après 3 ou 4 passes, ou 300 ou 400 passes comme les lutteurs sumo, vous vous relevez avec le dos droit et axé. Le gainage et les muscles profonds doivent être toujours sollicités.

Bien sûr, Shiko n’est pas une forme complètement fixée. La description précédente n’est qu’un exemplaire de ce qui peut être fait. Dans les vidéos Youtube, nous pouvons voir ce qui se fait dans le Sumo moderne, où il y a d’ailleurs différents styles. Ce qui apparaît comme spectaculaire est de lever la jambe très haut, en grand écart, ou de descendre bas, les bras écartés. On dit qu’autrefois, dans l’ancienne manière, le pied ne montait pas haut. Chacun peut s’approprier une forme ! La finalité est d’assouplir les membres inférieurs et de renforcer notre « conscience arrière ».

Bertrand CABOT